Le projet de loi « Sécurité publique » définitivement adopté !

Le Sénat a définitivement adopté, jeudi 16 février, le projet de loi relatif à la sécurité publique.

Je reviens avec vous sur les principaux points du texte qui ont « bougé » par rapport à la présentation que je vous avais proposée le mois dernier (consultable ici), en particulier les « nouveautés » pour la police municipale.

Ce texte sera très prochainement promulgué.

De nouvelles règles d’usage des armes à feu pour les policiers nationaux et municipaux, en pratique limitées

L’accord intervenu le 13 février en commission mixte paritaire a permis d’acter :

  • de l’alignement, au bénéfice des policiers, des règles d’ouverture du feu sur celles des gendarmes. Sont également concernés les douaniers et les militaires de l’opération « Sentinelle » ; 
  • à l’initiative du Sénat, de l’extension (moindre) des cas du recours à la force armée pour les policiers municipaux (autorisés à porter une arme), dans les cas précis suivants : prévenir une atteinte à la vie de l’agent ou d’autrui ou lorsque des individus armés les menacent. Les autres cas de figure prévus pour les forces de l’ordre (dont le « périple meurtrier ») n’ont pas été retenus dans le texte commun ; 

En 2015, près de 40% des policiers municipaux étaient équipés d’une arme à feu « réglementaire ».

Toutefois, qu’il s’agisse des policiers nationaux ou municipaux, cette extension du cadre de l’usage des armes à feu doit être fortement tempérée car, comme pour l’ensemble des forces de l’ordre, l’usage des armes à feu est en pratique toujours soumis aux principes de « proportionnalité » et « d’absolue nécessité »…

Quels changements concrets pour les polices municipales ?

La version définitive de ce texte prévoit que les policiers municipaux :

  • pourront être plus facilement mutualisés entre plusieurs communes limitrophes : selon le droit en vigueur, cette mutualisation est réservée aux communes de moins de 20 000 habitants formant un ensemble de moins de 50 000 habitants d’un seul tenant. Le texte supprime le plafond de 20.000 habitants et porte de 50.000 à 80.000 la population maximale de l’ensemble des communes concernées ;

Il s’agit d’une mesure de bon sens laissant aux élus locaux, en fonction de leurs besoins sécuritaires et dotations en agents, le choix de mutualiser les forces municipales, au bénéfice des collectivités qui en sont dépourvues. Cette solution est d’autant plus pertinente qu’il existe en réalité une autre solution à travers les constitutions d’une police intercommunale. Mais la pratique montre que les communes répugnent au transfert de leur pouvoir de police au niveau intercommunal.

Je crois donc plus efficace en pratique la mesure précitée de mutualisation.

En 2015, notre département comptait 80 policiers municipaux répartis entre 21 communes. À ma connaissance, il n’existe qu’un seul policier intercommunal à ce jour dans notre département, à travers l’initiative dont je vous ai déjà parlé de l’intercommunalité Sor-Agout. Pour la même année, notre pays comptait au total près de 21.000 policiers municipaux répartis entre 3.486 collectivités.

  • pourront procéder à des palpations de sécurité lorsqu’ils sont affectés sur décision du maire à la sécurité d’une manifestation ou de surveillance de l’accès à un bâtiment communal. Une limite cependant :  le nécessaire consentement exprès des personnes faisant l’objet de la palpation ;
  • pourront expérimenter, à la demande du maire, l’emploi de caméras individuelles pour une période de 2 ans ; L’opportunité de la généralisation de la mesure fera l’objet d’un rapport du Gouvernement.

La réintroduction discutable du délit de consultation habituelle des sites djihadistes

Vendredi 10 février 2017, le Conseil Constitutionnel censurait le délit de « consultation habituelle de sites Internet incitant à la commission d’actes de terrorisme ou en faisant l’apologie », créé par la loi du 3 juin 2016.

Trois jours plus tard, la commission mixte paritaire saisit l’opportunité du projet de loi sur la sécurité publique pour y introduire à nouveau le délit, modifié à la marge pour tenir compte de la décision des « Sages ». Pour être constitutive d’un délit, la consultation doit, en plus d’être « habituelle », être accompagnée d’une manifestation de l’adhésion à l’idéologie exprimée sur ces sites

La technique de ce « passage en force » est hasardeuse au regard de la règle dite de « l’entonnoir » (qui interdit l’introduction, au cours de la navette parlementaire, d’une mesure non discutée auparavant). Le risque d’une nouvelle censure me semble réel.

En savoir plus sur Philippe Bonnecarrère, Député du Tarn

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