C’est à Labastide-de-Lévis, une commune rurale de moins de 1 000 habitants située entre Gaillac et Albi que le bar-restaurant Le Baroudeur a ouvert ses portes le 3 août dernier. Un projet mené par la commune qui s’est lancée dans la construction d’un bâtiment communal multiservices qui accueille aujourd’hui l’épicerie-restaurant gérée en partenariat avec l’association « 1000 cafés » et deux cabinets paramédicaux. Rencontre avec François Vergnes, le maire de la commune depuis 2001 qui œuvre avec son équipe à la revitalisation du centre-bourg et tient à maintenir des services de proximité dans le village.
Monsieur le Maire, pouvez-vous revenir sur la genèse et la création de ce projet ?
Il y a trois ans, l’épicerie-bar-restaurant du village a cessé son activité de manière assez soudaine. Nous n’avions pas anticipé cette fermeture. Ce commerce était pourtant important dans la vie de la commune et cette fermeture a donc laissé un grand vide. Cela a été l’élément déclencheur qui a donné l’opportunité à la commune de s’impliquer. Nous avons donc voulu bâtir un bâtiment multiservices pour renforcer l’attractivité de la commune.
Nous avons donc conçu une structure prévue pour accueillir d’une part, un commerce multiservices de produits alimentaires avec éventuellement une partie bistrot et restauration, et d’autre part un local à usage médical.
Nous avons donc un bâtiment de 300 m2 modulable qui accueille à la fois l’épicerie-restaurant Le Baroudeur ainsi qu’un cabinet d’orthophonistes et un cabinet d’infirmiers.
Avez-vous réaménagé un espace déjà existant ?
Non, nous avons fait le choix de construire un bâtiment neuf sur un terrain qui appartenait à la commune, dans le nouveau quartier des Carrairoles.
Comment le partenariat avec Les 1000 cafés est-il apparu ?
Dans un premier temps, nous avions nous-mêmes trouvé des gérants pour ouvrir l’épicerie. Malheureusement, ils se sont désistés et nous avons dû revoir nos plans.
Nous avons contacté la structure des « 1000 cafés » qui a trouvé de l’intérêt à notre démarche et s’est associée à notre projet. Nous avons donc revu l’agencement du local pour satisfaire aux normes et au cahier des charges. Nous avons ajouté une partie café restauration qui est aujourd’hui le cœur de métier du nouveau commerce.
Comment avez-vous construit ce projet ?
Grâce à l’implications sans faille de certains élus, avec l’appui de la communauté d’agglomération, qui ont monté des dossiers complexes. Nous avons ainsi pu obtenir des fonds de la DETR, de la Région, des fonds européens, des fonds du Conseil Départemental. La communauté d’agglomération est aussi intervenue pour l’aménagement des abords
Pour la mise en œuvre du chantier, nous avons tenu à sélectionner des entreprises locales, heureusement très compétitives. Les projets publics doivent contribuer à la dynamique territoriale.
Après deux mois d’ouverture, quel bilan dressez-vous ?
Le lieu a ouvert très récemment, il y a un peu moins de trois mois. Je crois qu’il faut se laisser encore un peu de temps pour tirer des conclusions sérieuses.
En ce qui concerne l’espace médical qui comprend le cabinet d’orthophonie et de soins infirmiers, nous sommes ravis de son démarrage. Les praticiens disposent d’une bonne patientèle. Ce sont des services qui servent à la population de la commune. Les loyers de ces deux activités semblent raisonnables pour toutes les parties et nous permettent de couvrir nos frais d’investissement.
Pour ce qui est du bar-restaurant, les gérants ont été contents de leur mois d’août placé sous le signe de la saison touristique. C’est un couple dans la trentaine qui a encore besoin d’un peu de temps pour prendre ses marques et endosser véritablement le rôle de chefs d’entreprise. Nous les y encourageons avec bienveillance, confiance et honnêteté. Nous essayons justement d’apporter notre pierre à l’édifice avec du mentorat, de la mise en relation avec des entrepreneurs du territoire. Tout projet en phase de démarrage a devant lui des marges de progression. C’est bien normal. Le potentiel du village est important avec l’attrait touristique de la Cave viticole en particulier. Mais on peut aussi viser la clientèle de proximité qu’elle soit familiale en soirée ou professionnelle à midi.
Comment se passe le partenariat avec les 1000 cafés ?
En toute transparence, nous attendons plus de l’accompagnement proposé par 1000 cafés. L’équipe est dynamique, enthousiaste mais elle doit se frotter à la réalité du terrain !
Je pense que les conseillers qui suivent le projet sont plein de bonne volonté mais qu’ils manquent de certaines compétences pratiques. Les échanges avec l’équipe d’animation de l’initiative sont fréquents et très directs. On avance dans le bon sens. La qualité des relations entre le porteur de projet, 1000 cafés et la commune est un élément décisif de la réussite. Il ne faut pas hésiter à se parler franchement. Nous avons par exemple proposé à 1000 cafés de faire intervenir un « consultant » ayant une expérience dans ce type de commerce et notre demande a reçu une bonne écoute.
Quel conseil donneriez-vous à ceux qui veulent monter un tel partenariat avec les 1000 cafés ?
Je pense qu’il est essentiel d’adapter son projet aux spécificités de son territoire. Ce qui fonctionne à Labastide-de-Lévis ne marcherait probablement pas ailleurs. Mais je conseille aux élus de prendre des risques et d’enclencher de nouveaux projets. Qui ne tente rien n’a rien.
Pour votre commune, était-ce un projet risqué ?
Nous sommes une petite commune de moins de 1000 habitants et nous ne disposons que de très faibles ressources financières.
Dans le pire des cas où les activités ne fonctionneraient pas, nous avons prévu une sorte de parachute en concevant le bâtiment de manière à qu’il puisse être transformé et modulable. C’est vrai que nos marges de manœuvre financières sont extrêmement minces et nous poussent à avoir une solide ingénierie financière et administrative ainsi qu’une gestion rigoureuse des dépenses de la commune. Nous sommes dans une quête permanente d’économie et les élus sont très investis dans le montage de dossiers robustes afin d’obtenir des subventions.
Ce qui est terriblement frustrant c’est de voir que notre dotation globale de fonctionnement est dérisoire. Cela limite considérablement notre capacité à financer des projets… Et pourtant nous ne manquons pas d’idée !
Quand on regarde la devise inscrite sur les portes de la mairie « Liberté, égalité, fraternité », nous ne sommes pas vraiment convaincus d’être dans une situation d’égalité. Toutes les communes autour de nous perçoivent de l’Etat bien plus que nous. Labastide-de-Levis a des valeurs locatives très élevées et un taux de fiscalité bas, notre DGF en est considérablement amoindrie. La répartition se fait sur des bases juridiques et techniques obsolètes. Cela engendre une certaine amertume chez les élus.
A propos de l’initiative 1000 cafés
L’initiative « 1000 cafés » du GROUPE SOS contribue à revitaliser les communes rurales en ouvrant ou en reprenant des cafés multiservices dans les communes de moins de 3500 habitant.e.s. qui n’ont plus de café ou risquent de le perdre. Afin de développer le lien social et les services de proximité sur tout le territoire, 1000 cafés a lancé en septembre 2019 un appel à candidature à destination des élus qui souhaitent porter un projet d’ouverture de café multiservice dans leur commune. Cet appel à candidature est toujours ouvert.
Contacts :
Venez retrouver Meghane et Thomas au Baroudeur.
Du Mardi au Samedi 8h/14h30 – 17h30/23h. Le Dimanche 9h/13h
Pain, presse locale, service de colis, épicerie, café, restauration.