Que contient le texte définitivement adopté ?

Après l’échec de la commission mixte paritaire, le Sénat a réaffirmé avec forces ses positions sur deux sujets majeurs. A cette occasion, j’ai rappelé que notre pays était le seul en Europe à avoir pris 12 lois d’état d’urgence depuis le début de la crise sanitaire. Une exception qui doit nous interroger sur l’inflation normative dans laquelle les crises plongent notre droit.

Nous sommes devant le 12ème d’état d’urgence sanitaire. C’est l’exception française. Aucun autre pays en Europe n’a pratiqué ainsi.

Depuis 2015 et les événements terroristes, nous avons examiné 17 lois d’état d’urgence. Cela pose la question de l’inflation législative.

Philippe bonnecarrère

la commission des lois du Sénat a choisi de réaffirmer son accord de principe sur la transformation du passe sanitaire en passe vaccinal malgré certains désaccords sur ses modalités d’application, tout en reprenant la position du Sénat qui s’était affirmée avec force sur deux sujets majeurs :

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Le passe sanitaire transformé en passe vaccinal

Le passe sanitaire est remplacé par un passe vaccinal pour les plus de 16 ans et les adultes (le texte initial prévoyait de l’appliquer aux enfants dès l’âge de 12 ans).

Le passe vaccinal sera exigé dans presque tous les lieux où le passe sanitaire était nécessaire : accès aux bars et restaurants, aux activités de loisirs (cinémas,musées, théâtres, enceintes sportives, salles de sport et de spectacle…), aux foires et salons professionnels, aux grands centres commerciaux sur décision des préfets et aux transports interrégionaux (avions, trains, bus). Les professionnels travaillant dans ces lieux et services sont aussi concernés et auront donc l’obligation de se vacciner.

Dans certains cas toutefois, un certificat de rétablissement à la suite d’une contamination pourra être présenté à la place du certificat de vaccination. Le décret mettant en œuvre le passe vaccinal précisera cette exception. Ce décret pourra exiger également un double passe cumulant un certificat de vaccination avec un test négatif pour certains lieux et activités. Il prévoira, par ailleurs, pour les personnes, public comme professionnels, qui n’ont pas un schéma vaccinal complet et qui s’engagent dans cette démarche, la possibilité de disposer d’un passe vaccinal transitoire. Dans l’attente, ces personnes devront présenter un test négatif.

Les quelques exceptions au passe vaccinal

Le passe sanitaire continuera à s’appliquer pour les enfants âgés de 12 à moins de 16 ans.

Le passe sanitaire est maintenu pour l’accès aux hôpitaux, aux cliniques, aux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et aux maisons de retraite, sauf cas d’urgence. 

Le passe sanitaire pourra également être maintenu pour une durée limitée dans certains territoires sur décision des préfets (habilités par le Premier ministre) « lorsque les circonstances locales le justifient » (par exemple en cas de faible vaccination de la population comme en outre-mer).

Pour l’accès aux transports interrégionaux, les voyageurs qui ne disposent pas d’un passe vaccinal pourront présenter un test négatif en cas de motif impérieux d’ordre familial ou de santé.

Enfin, en vue de l’élection présidentielle, un amendement a prévu que les organisateurs de meetings politiques pourront demander un passe sanitaire aux participants.

Les contrôles et les sanctions renforcés

Le projet de loi élargit les possibilités de vérification du passe. En cas de doute sérieux sur l’authenticité du passe, les professionnels chargés de le contrôler, comme les cafetiers ou les restaurateurs par exemple, pourront demander à leurs clients un document officiel avec photo (carte d’identité, permis de conduire, carte vitale…) pour vérifier la concordance d’identité entre les documents. La réglementation prévoit déjà, dans certains cas, la vérification d’identité par les professionnels (pour les paiements par chèque, pour l’interdiction de la vente d’alcool aux mineurs…).

Sur ce point, le Sénat avait défendu une position bien différente.

Les sanctions encourues en cas de fraude au passe sont aussi durcies. Les personnes présentant un passe appartenant à quelqu’un d’autre ou prêtant leur passe, de même que les professionnels ne contrôlant pas le passe, risqueront une amende forfaitaire de 1 000 euros dès la première infraction.

De plus, le simple fait de détenir un faux passe pourra être puni de trois ans de prison et 45 000 euros d’amende (le texte initial prévoyait des sanctions plus lourdes, abaissées par les sénateurs). Jusqu’ici, les sanctions étaient réservées à l’établissement, à la procuration ou à l’usage de faux passes.

Toujours en matière de sanctions, un système de repentir a été introduit au cours de l’examen du texte par le gouvernement, pour les personnes qui ne présentent pas de passe ou présentent un faux passe ou le passe de quelqu’un d’autre. Aucune peine ne leur sera appliquée si dans les 30 jours qui suivent l’infraction, elles se font vacciner. Ce dispositif s’appliquera aussi aux personnes verbalisées ou poursuivies avant janvier 2022.

Un autre dispositif, issu d’un amendement du gouvernement, permet à l’inspection du travail de sanctionner d’une amende administrative de 500 euros par salarié (plafonnée à 50 000 euros) les entreprises qui ne respectent pas le protocole sanitaire (télétravail…). Ce dispositif est prévu au plus tard jusqu’au 31 juillet 2022.

Ce régime de sanction accru n’était pas souhaité par le Sénat qui avait misé sur le maintien d’un système incitatif.