Avis sur les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration »

Dans le cadre du Projet de loi de Finances pour 2022, j’ai donné un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». Cet avis, pris en commission des Lois, avec ma collègue Muriel Jourda est intervenu après avoir procédé à l’audition de Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté. Nous avons regretté l’absence de ligne directrice, alors même que l’ampleur des défis et la reprise des flux migratoires justifieraient des choix politiques forts.

Accéder à l’essentiel de l’avis budgétaire

La mission « Immigration, asile et intégration »

Cette mission représente 2 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 1,9 milliard d’euros en crédits de paiement (CP). Composée de deux programmes, elle porte les crédits de la direction générale des étrangers en France (DGEF) au sein du ministère de l’intérieur, qui met en œuvre la politique d’asile, d’immigration et d’intégration avec l’appui de deux opérateurs : l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII, 265 M€, 1 187 emplois
équivalents temps plein travaillés – ETPT) et l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA, 93 M€, 1 003 ETPT).

Augmentation des crédits de la mission

Après une augmentation de 2 % sur l’exercice 2021, les CP de la mission poursuivent leur progression en 2022 avec une hausse de + 3,2 % (+ 58 M€). Les AE connaissent, quant à elles, une hausse substantielle de l’ordre de + 14 % (+ 240 M €). La hausse des crédits se concentre principalement sur les actions « garantie de l’exercice du droit d’asile » (+ 2,7 % en CP et + 18% en AE) et « lutte contre l’immigration irrégulière » (+ 12,5 % en CP et + 19 % en CP).

Plus de deux-tiers des crédits sont concentrés sur la prise en charge des demandeurs d’asile pendant l’instruction de leur dossier (1,3 Md€, soit 69 % du total), que ce soit pour le versement de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) ou leur hébergement.

Si les crédits de la mission sont, certes, en augmentation, cette hausse ne modifie qu’à la marge son économie générale et n’apporte aucune réponse crédible aux insuffisances chroniques de la politique migratoire sur la période récente.

Rapport de Philippe bonnecarrere et de muriel jourda

En outre, la progression des crédits se concentre sur deux pans seulement de la mission et résulte, pour l’essentiel, de contraintes externes :

  • la reprise attendue des flux de demandeurs d’asile : le Gouvernement prévoit une augmentation de 10 % des demandes d’asile par rapport à 2019, soit un total de 145 700 demandes. Cette croissance attendue se traduit mécaniquement par une augmentation de la dotation de l’ADA (+ 4 % à 467 M€ et + 8 % à 487 M€ en tenant compte des crédits provisionnés) ;
  • la poursuite du plan d’investissement pour les centres de rétention administrative (CRA) : la montée en charge du plan d’investissement en CRA se traduit par une augmentation de 51 % des crédits dédiés en CP (39,4 M€) et explique l’essentiel de la progression des CP. S’il s’agit d’une avancée indéniable, ce plan n’est pas une ambition nouvelle et il ne peut être pleinement efficace que si, en aval, le taux d’exécution des mesures d’éloignement s’améliore.

En définitive, le budget présenté se caractérise par l’absence de ligne directrice, et ce alors même que l’ampleur des défis justifierait des choix politiques forts. La reprise des flux migratoires attendue après la crise sanitaire pourrait mettre l’ensemble des acteurs impliqués sous tension, tandis que les services de l’administration commencent seulement à retrouver un rythme de fonctionnement normal après la période de ralentissement induite par la crise sanitaire. Dans ce contexte, ce budget ne propose des ajustements qu’à la marge, essentiellement contraints et très en-deçà des enjeux.