Polices municipales : bientôt des pouvoirs élargis ?

Renforcer les pouvoirs des polices municipales, c’est l’objectif de la proposition de loi « Vers une sécurité globale » dont une nouvelle version plus musclée a été déposée. Armement de la police municipale, drones, floutage des policiers, feux d’artifice, rodéos urbains, tour d’horizon des sujets couverts par ce texte toujours en cours de navette parlementaire.

Plus de deux ans après la présentation de leur rapport sur le continuum de sécurité, les députés Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue ont dévoilé une nouvelle mouture de leur proposition de loi adaptée aux annonces récentes du gouvernement, qui vise notamment à renforcer les pouvoirs des polices municipales. 

« Jusqu’à présent, peut-être, les polices municipales n’ont-elles pas été respectées comme elles devaient l’être. Elles ont toute leur place dans le continuum de sécurité », a affirmé Gérald Darmanin qui a apporté son soutien à la PPL lors de son audition devant la commission des Lois de l’Assemblée nationale.

La proposition de loi a été enrichie avec la création du cadre juridique de l’expérimentation de l’élargissement des compétences des policiers municipaux initié par le Premier ministre Jean Castex lors d’un déplacement à Nice le 25 juillet dernier, mais aussi avec l’instauration d’un régime juridique de captation des images par drone.

Les polices municipales dotées de pouvoirs élargis

« Cette expérimentation répond aux demandes de nombreuses communes, et constitue une vraie avancée pour la sécurité globale de nos concitoyens, sans rien renier du rôle et des missions des forces étatiques de sécurité », estiment les auteurs du texte.

Alice Thourot et jean-michel Fauvergue, AUteurs de la Proposition de loi

L’article 1er , vise en effet à autoriser les communes disposant d’une police municipale de plus de 20 agents (dont le directeur ou le chef de service a été « dûment habilité par le Procureur général), à expérimenter l’élargissement de leur domaine d’intervention sur la voie publique pour une durée de trois ans.

La liste limitative des infractions qu’ils sont habilités à constater sera ainsi étendue. Le texte précise que, par dérogation, les agents de police municipale dûment habilités pourront :

  • En cas de constatation d’un délit ou d’une contravention de cinquième classe prévus par le code de la route ou le code pénal pour lesquels la peine de confiscation du véhicule est encourue, faire procéder à l’immobilisation et à la mise en fourrière du véhicule ;
  • Pour les infractions commises sur la voie publique et qu’ils sont compétents pour constater, procéder à la saisie des objets ayant servi à la commission des infractions ou qui en sont le produit et pour lesquelles la peine de confiscation de l’objet ou du produit est prévue ;
  • Constater par procès‑verbaux, dès lors qu’ils sont commis sur le territoire communal et qu’ils ne nécessitent pas de leur part d’actes d’enquête, les délits suivants :
    • vente à la sauvette,
    • conduite sans permis,
    • défaut d’assurance,
    • occupation des halls d’immeuble,
    • usage de stupéfiants;
    • violation, destruction et dégradation lorsque cela concerne des biens communaux,
    • vandalisme.
  • Constater par procès‑verbaux, lorsqu’elles sont commises sur le territoire communal et qu’elles ne nécessitent pas de leur part d’actes d’enquête, les contraventions relatives aux débits de boissons, à la lutte contre l’alcoolisme, à la répression de l’ivresse publique et à la protection des mineurs.

Par ailleurs, les communes concernées devront remettre un rapport d’évaluation au gouvernement au plus tard neuf mois avant la fin de l’expérimentation. Ce dernier remettra à son tour au Parlement un rapport d’évaluation général de la mise en œuvre de l’expérimentation au plus tard six mois avant son terme.

Il y a une très forte demande de l’opinion publique pour un renforcement des polices municipales. Cela suppose un problème évident de coût, accessoirement de formation.

Reste la question de fond posée par Gérald Darmanin, que je rappelais plus haut : « La police municipale a toute sa place dans le continuum de sécurité. »

De réforme en réforme, et malgré les discours, je constate une forme de banalisation ou de superposition entre police municipale et police nationale.

Je ne suis pas convaincu que ce sujet soit stabilisé et ne serai pas particulièrement opposé à une organisation différente avec d’un côté une police dite de proximité et d’autre part une police dite régalienne qui assurerait tout le volet judiciaires, tout le volet antiterrorisme, et plus généralement tout ce qui relève de l’ordre public.

Captation des images par drone

La proposition de loi réglemente aussi l’utilisation des images de vidéosurveillance, des images de drone ou encore celles des « caméras-piétons ». 

« La police utilise déjà des drones [mais] dans un cadre légal qui n’est pas stabilisé », a expliqué Gérald Darmanin, ajoutant que la Cnil et le Conseil d’Etat demandent une clarification législative.

L’article 22 de la proposition de loi autorise donc les services de l’État concourant à la sécurité intérieure et à la défense nationale et les forces de sécurité civile à filmer par voie aérienne pour des finalités précises, en fixant les garanties qui assurent le respect des libertés publiques.

La proposition de loi permettra aussi aux enquêteurs de visualiser en direct les images filmées par les « caméras-piétons » dont sont équipées les forces de l’ordre. 

L’armement des policiers en débat

Sans surprise, la ppl a relancé le débat sur le port d’arme par les policiers municipaux.

« La police municipale ne doit pas être la police nationale », a prévenu Gérald Darmanin. La police nationale conservera donc ses prérogatives en matière d’enquête, de rétention, de lutte antiterroriste ou encore de lutte contre la grande criminalité.

Diffusion de l’image des policiers

La diffusion « malveillante », notamment sur les réseaux sociaux, de l’image des policiers nationaux et militaires de la gendarmerie en intervention sera punie d’un an d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende.

Pour le ministre, il s’agit de ne pas « jeter en pâture des fonctionnaires qui font un travail extrêmement difficile« .

« Vous connaissez tous des policiers ou des gendarmes qui sont insultés quand ils sont au supermarché avec leurs enfants ou leurs femmes », a ajouté Gérald Darmanin.