Le Sénat a adopté le 4 février 2016 une proposition de résolution européenne portant sur les conséquences du traité transatlantique pour l’agriculture et l’aménagement du territoire.
Je suis intervenu en séance, en introduction de l’examen de ce texte qui se concentre sur des sujets fondamentaux pour notre pays.
Ce texte s’inscrit dans le prolongement de plusieurs initiatives sénatoriales relatives à la défense des intérêts agricoles français et européens. J’avais eu l’occasion d’évoquer cette question dans un rapport de synthèse co-rédigé avec mon collègue Daniel Raoul, publié en novembre 2015 (à découvrir ici).
Outre les critiques adressées à l’encontre de ces négociations commerciales transatlantiques (jugées peu transparentes et peu démocratiques), il s’agit pour deux modèles agricoles profondément différents dans leur approche et leur méthode de production de trouver dans cet accord futur leurs intérêts réciproques.
Les pratiques d’élevage, par exemple, différent fortement et pourraient mettre en difficulté notre secteur. Là où l’Europe nourrit ses troupeaux bovins avec des aliments presque exclusivement produits sur place (plus de 80% de la ration de base est composée d’herbe), les États-Unis recourent massivement aux céréales, tourteaux et autres additifs alimentaires utilisés comme activateurs de croissance. Là où les plus grosses exploitations d’élevage françaises accueillent entre 60 et 200 bovins en moyenne, les deux-tiers des élevages américains sont engraissés dans les « feedlots », qui peuvent contenir jusqu’à 200.000 bêtes.
Les plus faibles réglementations relatives à l’environnement et au respect du bien-être animal, couplées à une main d’oeuvre moins chère (dû notamment à une plus forte mécanisation) menacent clairement le secteur européen de l’élevage bovin, et plus particulièrement le secteur français.
La France et l’Europe ont en revanche des atouts à faire valoir dans le secteur des produits laitiers. En la matière, il faudra veiller à abaisser les tarifs douaniers américains, très élevés (jusqu’à 80% pour certains fromages), couplés aux barrières non-tarifaires (embargos, procédures complexes d’accès au marché). Les américains voient en nos fromages à pâte molle et au lait cru de fortes menaces sanitaires.
Autre point très sensible des négociations, les indications géographiques européennes, non reconnues par les américains qui y préfèrent le système des « marques » (qui doivent être renouvelées tous les 10 ans et peuvent être vendues). Il s’agit là d’un sujet stratégique pour la France : nous devons faire reconnaître et protéger une liste ciblée d’indications géographiques, chacune étant liée à un savoir-faire et à un mode de production spécifiques. Ne pas reconnaître dans ce traité transatlantique nos indications géographiques signerait très probablement leur disparition dans les autres accords commerciaux à venir.
J’ai également eu le plaisir de participer au débat « TTIP : Quelles opportunités pour la France ? » organisé par le réseau de médias européens Euractiv (voir vidéo ci-dessous), au cours duquel j’ai tenu à indiquer clairement que le TTIP ne serait pas approuvé par le Parlement si l’élevage n’était pas préservé.
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