Une réforme des retraites est indispensable pour pérenniser notre système et endiguer son déficit d’ici 2030. Ce propos n’a rien de très populaire et tout ce qui est proche d’un propos « techno » est rejeté par nos concitoyens.
Toute la difficulté du sujet des retraites est liée à l’infinie diversité de situation de nos concitoyens. Celui qui aura une carrière linéaire sera bien entendu dans une position très différente de celle de nos concitoyens dont la vie aura été « cabossée ».
C’est toute la différence entre l’approche « macro-économique » et la situation « micro-économique », chacun regardant toute réforme des retraites à l’aune de sa situation personnelle.
Nous sommes dans de l’humain plus que dans de l’économie.
Plus que d’autres, le sujet des retraites appelle à une grande modestie dans l’expression mais aussi à de la clarté et de la sincérité.
Chacun doit se positionner et je ne souhaite pas éluder cet obstacle.
Je suis, en conscience et responsabilité, favorable à la réforme des retraites.
Philippe Bonnecarrère
Pourquoi ?
L’allongement bienvenu de notre durée de vie, l’arrivée à la retraite de la génération du baby-boom et en activité de classes plus « creuses « sont des faits incontournables dans un système par répartition où les actifs d’aujourd’hui ou de demain financent. Toute autre serait la situation dans un système où chaque Français constituerait sa retraite par ses cotisations.
A partir du moment où nous avons collectivement fait le choix de la répartition et non de la capitalisation, écarté la retraite par points, notre situation ne peut être différente de celle de tous les autres européens qui ne sont pas plus sots que nous. La France peut difficilement dire que rien ne doit changer alors que nous vivons plutôt plus longtemps que les autres , que notre durée de travail annuelle est parmi les plus faibles et que nous partons le plus tôt à la retraite, le tout avec un endettement plus haut que la plupart de nos voisins et une fiscalité au top mondial. Chacun sera mécontent mais sait, au fond de lui- même, qu’il n’existe pas d’alternative crédible.
Ceci n’interdit pas de garder les yeux bien ouverts. Les questions des carrières longues et de la pénibilité sont à traiter sérieusement . Dans un département comme le Tarn, la retraite minimale à 1200 euros pour une carrière complète ou les droits supplémentaires aux aidants familiaux ne sont pas à négliger. J’attache également beaucoup d’importance à ce que chacun puisse disposer au maximum d’une palette de choix suivant que l’un voudra partir tôt et sera prêt à accepter une décote ou l’autre majorer sa retraite en travaillant plus tard. Sur un sujet aussi sérieux qui touche à notre relation au travail et à l’intime, il n’est pas de démagogie possible et chacun peut aussi s’interroger sur la place des seniors dans notre société.
Je lis de temps en temps que la démographie serait le grand « impensé » de cette réforme.
Cette formule me surprend dans la mesure où le vieillissement de la société française comme celle de nos voisins européens me semble incontestable.
Si le travail de 3 actifs assurait le niveau de vie d’1 retraité en 1970, nous sommes actuellement à 3 actifs pour 2 retraités.
Est-ce qu’il existe des alternatives ?
Je veux espérer que chacun écartera une alternative par baisse des pensions.
Pour certains il suffirait d’augmenter le taux de cotisation des actuels salariés ainsi que des employeurs ce qui revient pour les premiers à réduire leur pouvoir d’achat et pour les seconds à rajouter une charge. La vraie question posée par une telle alternative est de savoir si la préférence va à une réduction de son pouvoir d’achat ou au fait de financer par un travail plus long.
C’est la même question, sous une autre forme que celle de la décote ou de la surcote en fonction de la date effective du départ à la retraite.
Intensifier notre temps de travail en revenant sur les 35 heures a toutes chances d’être aussi impopulaire !
Pour être complet certains pourraient penser que quelques impôts en plus pourraient contribuer à l’équilibre de nos retraites.
Je ne reprendrai pas l’argument évoqué plus haut qui fait de notre pays un pays record en matière de la fiscalité et qu’il faudrait peut-être penser à ne pas continuer sur une telle pente.
Le sujet est ailleurs : si une partie des retraites est demain financée par la fiscalité, cela revient à dire que le paiement de la retraite d’une génération n’est plus assuré par la génération qui suit mais devient une dépense fiscale.
Les dépenses fiscales ont comme inconvénient d’être examinées dans un budget annuel là où il vaut mieux raisonner en matière de retraite à 10, 20 ou 30 ans et sans être spécialement de mauvais augure, il n’est pas interdit de penser que notre pays, avec 160 milliards de déficit annuel à l’heure présente, aura quelques sujets budgétaires à traiter dans l’avenir.
Imaginer que , l’année X, les efforts budgétaires à réaliser conduisent à ne pas pouvoir financer la contribution d’équilibre sur les retraites montre bien l’absurdité d’un tel système.
La retraite est obligatoirement liée au travail qui a pu être assuré ou qui est assuré par nos successeurs.
C’est par définition un mécanisme intergénérationnel et non une charge de nature fiscale , à l’exemple du financement des routes et où de la rémunération de nos enseignants.
La retraite relève de notre organisation sociale, pas de notre régime fiscal.
Par contre, il y a bien un lien entre le montant des cotisations et les capacités économiques d’un pays suivant que nous serons par exemple ou pas dans une situation de plein emploi.
La croissance reste sur le long terme le meilleur et seul moyen de financer un régime de retraite équilibré. La croissance n’est pas un acquis : nous devons résister à toutes les injonctions contradictoires qui , admettons -le , freinent les activités dans notre beau pays.