Le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation la déconcentration, et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (dit projet « 4 D »), sera examiné à partir du 7 juillet en séance publique, au Sénat. Ce texte a été sensiblement enrichi par le Sénat lors des travaux en commission des Lois. Quelque 367 amendements ont été adoptés par la commission inspirés notamment par les « 50 propositions du Sénat pour le plein exercice des libertés locales » présentées par le Sénat le 2 juillet 2020. Explications sur la ligne directrice sénatoriale en attendant les travaux en séance publique qui s’échelonnent jusqu’au 21 juillet.
Approfondir les mesures de différenciation et de déconcentration
Le Sénat a souhaité réaffirmer la différenciation comme objectif à part entière du législateur et du pouvoir réglementaire :
- en mettant en place une procédure spécifique de proposition de modifications législatives et réglementaires émanant des collectivités territoriales
- en réécrivant l’article 3 pour lever les freins juridiques persistant à la pratique de la délégation de compétences entre les collectivités territoriales et leurs groupements
- en favorisant un exercice différencié des compétences au sein du bloc communal en ouvrant la possibilité de transferts de compétences « à la carte » des communes vers l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre auquel elles appartiennent, et en rétablissant le critère de l’intérêt communautaire ou métropolitain pour l’exercice des compétences transférées aux EPCI à fiscalité propre dans divers domaines
- en introduisant plusieurs mesures tendant à améliorer les relations entre l’État et les collectivités, condition d’une différenciation réussie dans les territoires
Déception sur la décentralisation
La commission des Lois a déploré que les transferts proposés par le Sénat dans le rapport « 50 propositions pour le plein exercice des libertés locales » n’aient trouvé qu’une faible traduction dans le projet de loi. En effet, les deux principales mesures de décentralisation que sont les transferts des routes aux départements, aux métropoles et régions volontaires, restaient dans le texte très floues.
Plusieurs améliorations du texte ont donc été proposées par la Commission :
- allongement de la durée de l’expérimentation du transfert de la compétence « voirie » aux régions
- possibilité de délégation, plutôt que d’un seul cinquième comme proposé dans le texte initial, de la totalité des fonds « économie circulaire » et « chaleur » aux régions
- inciter le Gouvernement à proposer un véritable transfert des gestionnaires des collèges et lycées aux départements et régions
- introduction d’un principe d’un réexamen régulier des charges de fonctionnement et d’investissement associées aux transferts
- proposition de nouveaux transferts de compétences aux collectivités territoriales
- attribution de nouvelles facultés d’octroi d’aides à certaines collectivités
Renforcement du rôle du préfet dans le département
Jugeant les dispositions liées à la déconcentration trop timides, la commission a voulu renforcer le rôle des préfets de département. Elle a ainsi notamment inscrit dans le texte, le principe selon lequel toute décision prise au niveau territorial relève prioritairement du préfet de département. D’autre part, elle a prévu que la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) serait attribuée en majeure partie au niveau départemental. Enfin, elle a attribué au préfet de département et non au préfet de région, la mission de présenter le rapport sur les priorités de l’Etat aux comités de bassin.
Mesures de simplification
La commission a, en premier lieu, rappelé que les mesures de simplification de nature législative ne sauraient être réalisées sans respecter les prérogatives du Parlement. Partant de ce constat, la commission a supprimé les dispositifs qui étaient, en réalité, soit des complexifications inutiles, soit des mesures pour lesquelles la nécessité de légiférer n’était pas établie, notamment, concernant les contrats de cohésion territoriale, l’obligation d’utilisation des bases d’adresses locales et la coopération transfrontalière en matière de documents d’aménagement du territoire.
Pour l’amélioration des dispositifs qui simplifient l’action publique locale :
- renforcement du contrôle des entreprises publiques locales (sociétés d’économie mixte, sociétés publiques locales) à condition que les mesures envisagées n’entravent pas inutilement leur fonctionnement et ne lèsent pas les intérêts des tiers (articles 70 à 73).
- renforcement des dispositifs d’échanges de données entre administrations
Volet sanitaire et cohésion sociale
- Remaniement de l’article permettant aux collectivités de financer des investissements d’établissement de santé, afin que ce dispositif demeure strictement volontaire.
- Suppression de l’expérimentation permettant la recentralisation du RSA. Le Sénat défend une meilleure compensation par l’État des dépenses engagées par les départements dans le cadre de cette compétence.
- Enfin, la réforme de la gouvernance des agences régionales de santé (ARS) telle que prévue par le gouvernement, paraît à cet égard bien trop timide. Les Sénateurs souhaitent qu’à la place de l’attribution de deux vice-présidences à des élus locaux, ils envisagent notamment une co-présidence des ARS par le président de région et le préfet de région.
Volet transport
- Sur le transfert aux départements et aux métropoles des routes nationales ou des autoroutes non concédées, les sénateurs sont dans l’attente de la liste exacte des routes nationales qui pourraient être transférées. En effet, lors de son audition par le Sénat sur le projet de loi 4D, le ministre délégué en charge des Transports aurait affirmé que la liste des routes transférées ne serait dévoilée qu’après le vote de la loi et la publication des textes réglementaires.
- Les Sénateurs ont aussi prévu une sécurisation de l’inter-opérabilité des lignes en marge du transfert de « petites lignes ferroviaires » et de leurs gares aux régions.
Volet logement
Sur ce vote, la commission s’est inspirée des travaux déjà fournis sur la loi SRU et du rapport d’information des sénatrices Mmes Estrosi-Sassone et Létard. Parmi les positions adoptées :
- Prolongation de la loi sans date butoir et en rattrapage glissant
- Réforme des exemptions
- Mise en place d’un rattrapage différencie et contractualisé via un contrat de mixité sociale signé entre le maire, le préfet et l’EPCI et les bailleurs sociaux, dont le pivot sera le couple maire/préfet
- La suppression des sanctions
- Remplacer l’habilitation à légiférer par ordonnance sur le foncier solidaire par des précisions et améliorations en clair dans la loi
- Extension de la compétence des OFS à des opérations portant sur les logements existants à acquérir ou déjà en leur possession.