Gérard Larcher : Comment sortir de la crise sociale ?

 

Gérard Larcher : Comment sortir de la crise sociale ? 

Alors que notre pays traverse une crise sociale profonde, j’ai souhaité recueillir les réactions du Président du Sénat, Gérard Larcher. Confiance, révision constitutionnelle, démocratie participative : tour d’horizon des solutions pour sortir de la crise. 

D’où vient pour vous le mal-être des Français : économique, social, territorial, identitaire, culturel ?

Notre pays est fracturé. Une partie de notre Nation a le sentiment d’être ni entendue ni écoutée. Cette « France d’à côté » se sent reléguée et à l’écart de tout projet politique. Elle subit, sans forcément les comprendre, les effets cumulés de la mondialisation, de la financiarisation et de la métropolisation. Et ça n’a jamais été aussi vrai qu’aujourd’hui. N’avez-vous jamais entendu chez vos concitoyens qu’Albi, Castres, Lavaur, Carmaux ou les monts de Lacaune sont plus éloignés de Paris, que Paris ne l’est de Londres ou de Barcelone ! Mais la question de la verticalité de la gouvernance doit être posée. Tout ne doit pas se décider à Paris. 

 

Comment rétablir la confiance des Français ?

La confiance ne se décrète pas, elle se gagne. Depuis une décennie, mais encore plus depuis quelques mois, le rejet du politique est net, mais plus largement de toutes les « élites » du pays : journalistes, syndicats… Aujourd’hui seuls les maires obtiennent une large confiance des Français. Cette confiance est directement liée à la relation de proximité qu’ils entretiennent avec leurs électeurs. 

Est-ce que la décentralisation et ou la déconcentration pourrait être l’une des solutions aux maux de la France ?

Je souhaite une nouvelle étape de décentralisation afin que les élus locaux soient pleinement considérés comme des « majeurs capables », comme des partenaires de l’Etat. Ils ne sont pas des chefs de bureau de l’administration ! Cette nouvelle décentralisation doit être fondée sur les libertés locales, sur le respect et la reconnaissance des élus ; la proximité et la subsidiarité ; la différenciation territoriale et l’expérimentation dans le respect de l’unité de la République ; l’autonomie financière et fiscale.

Est-ce qu’un référendum ou la révision constitutionnelle sont pour vous des éléments d’une sortie de crise pour le pays ?

Le référendum ne peut être une réponse à la crise, car ce mouvement de protestation nait d’une révolte des classes moyennes face à l’overdose fiscale qu’elles subissent mais est devenu un mouvement beaucoup plus large. On sait que lors d’un référendum, on ne répond pas à la question posée. En matière de démocratie participative, nous sommes prêts à des avancées comme la simplification du droit de pétition. Mais attention à ne pas fragiliser la démocratie représentative.

Est-ce que le Sénat peut apporter des solutions aux besoins de participation de nos concitoyens ?

Le Sénat a été le premier à attirer l’attention du gouvernement sur les risques de l’augmentation des taxes sur le carburant, de la non indexation des retraites, sur le niveau des dépenses publiques, sur la fracture territoriale. C’est lui qui est à l’initiative du texte anti-casseurs, qui a fait des propositions sur le statut de l’élu local et la revitalisation des centres-bourgs, qui s’est opposé à l’instauration autoritaire du 80 km/h, qui a imaginé un système de quotas en matière d’immigration.

Les gilets jaunes expriment souvent la revendication d’une suppression du Sénat. Est-ce que notre pays a besoin du Sénat ? 

La République a besoin d’un contre-pouvoir qui ne procède pas de l’élection présidentielle. Libre et responsable, privilégiant l’intérêt du pays. Un contrepouvoir susceptible de contrôler l’action du gouvernement en toute indépendance. C’est le Sénat !