Interview de mon collègue Olivier Cigolotti, Sénateur de la Haute-Loire, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et auteur d’un rapport « Les impensés de la loi de programmation militaire : préparation opérationnelle, disponibilité des équipements et évolutions du soutien » paru en juin 2023.

Quelles sont les grandes ambitions de la LPM 2024-2030 ?

Cette loi de programmation militaire doit nous permettre de poursuivre 5 objectifs principaux : 

– Garantir la crédibilité de notre dissuasion,

– Assurer notre sécurité collective,

– Assurer notre défense dans les nouveaux espaces de conflictualité,

– Anticiper les conflits de haute intensité, 

– Et enfin, maintenir le rang de la France parmi les premières puissances mondiales.

En examinant ce texte structurant pour nos forces, le Parlement et le Gouvernement ont le devoir, ENSEMBLE, de déterminer le modèle d’armée que nous souhaitons pour faire face aux enjeux de souveraineté auxquels la France doit répondre, à l’heure où les compétiteurs et les états puissances ne cachent plus leurs ambitions.

Que pouvez-vous dire de l’effort budgétaire prévu par ce texte ?

L’enveloppe globale est fixée à 413 milliards d’euros sur 6 ans. Cette augmentation de la part du budget de la nation consacrée à nos armées est la bienvenue.

Elle poursuit le mouvement engagé dès 2019 avec la précédente LPM qui avait déjà  pour objectif, avec ses 295 milliards d’euros, de porter la part des dépenses militaires à 2% du PIB en 2025 et de créer 6 000 emplois. 

Cette trajectoire budgétaire de croissance visait déjà à régénérer le capital opérationnel des armées pour constituer une première étape vers un « modèle d’armée complet et équilibré ». 

Cette démarche est poursuivie à travers ce texte notamment avec : 

– 5 milliards pour le futur porte-avions français de nouvelle génération,

– 5 milliards qui seront investis dans les drones,

– 49 milliards qui seront consacrés à l’entretien du matériel militaire,

– Notons également que les moyens en matière de renseignements militaires vont augmenter de 60%,

– Enfin, un réel effort est notable pour répondre à l’hypothèse d’engagement majeur comme à la haute intensité (HI).

Un point de vigilance doit cependant être souligné : celui de l’inflation qui devrait peser, selon les prévisions, 30 milliards d’euros sur la période. Elle reste une ombre qui pèsera lourdement sur la réalité concrète de la programmation.

Cette LPM est-elle synonyme d’un nouveau modèle d’armée ?

On pourrait penser que cette loi n’est qu’une continuité budgétaire qui nous expose

– au risque de courir en même temps après un modèle complet d’armée et un modèle de meilleur niveau, 

– mais de finalement n’en attraper aucun et d’aboutir à une armée échantillonaire et un déclassement opérationnel.

Je pense pour ma part qu’il faut plutôt lire ce texte comme essentiel pour : 

– Conforter les fondamentaux de notre défense,

– Adapter notre outil militaire à l’évolution des menaces, 

– Réussir les sauts technologiques,

– Et accroitre les forces morales.

Les risques sont plus importants que jamais et pourraient aller jusqu’à un engagement de haute intensité. 

Olivier Cigolotti, juillet 2023

Nous souhaitons adapter notre modèle d’armée afin de le renforcer, de le réformer au mieux pour être prêts à répondre à l’ensemble des risques auxquels nous pourrions faire face.