Agora de la justice

En amont du lancement des Etats généraux de la justice par le gouvernement, le Sénat a organisé une Agora de la justice sur le thème « Retrouver confiance en la justice », le lundi 27 septembre 2021. L’occasion pour les Sénateurs de débattre avec des intervenants du monde la justice (magistrats, avocats, greffiers, et représentants des services pénitentiaires) et des membres de la société civile.

Revoir la conférence en vidéo en cliquant ici.

53 % des français déclarent ne pas avoir confiance en la justice

C’est un des constats du sondage Le rapport des Français avec la justice » commandé par la commission des lois du Sénat.

Cette étude révèle aussi que 67 % des Français trouvent la justice trop lente et en conséquence, 59 % des interrogés déclarent ne saisir la justice en cas de litige qu’en dernier recours.

Autre enseignement de ce sondage, en matière pénale, les résultats du sondage sont également sévères. 93 % des Français sont favorables à un durcissement des peines. Seulement 30 % des Français considèrent les sanctions adaptées pour les faits de petite délinquance. 94 % des sondés plaident pour améliorer l’exécution effective des peines, 84 % pour construire plus de places de prison.

Ils sont également en faveur d’une amélioration de l’exécution des décisions de justice (95 %), pour un recours à la médiation dans les affaires civiles 90 %, et dans une moindre mesure pour la mise en place d’une justice numérique (56 %).

16 propositions sénatoriales

Les résultats de ce sondage ont servi de base au travail de la commission des Lois du Sénat qui a présenté, à l’occasion de cet Agora, 16 propositions afin de renouer la confiance des citoyens envers leurs institutions judiciaires.

Parmi les propositions, on peut lire : poursuivre la mise à niveau des effectifs dans les juridictions, accélérer la numérisation du service public de la justice, poursuivre le plan de recrutement et la formation des conciliateurs de justice, ou encore engager la mise en place d’un tribunal des affaires économiques auquel serait notamment confié tout le contentieux de la prévention et du traitement des difficultés des entreprises.

Philippe Bonnecarrère, rapporteur actuel du projet de loi pour la confiance dans la justice a relevé le paradoxe entre les attentes des français en ce qui concerne la justice pénale et le constat inverse d’une judiciarisation excessive de la société : « trop ou trop peu, l’éternel dilemme de la justice. » Le Sénateur a aussi rappelé que le taux de réponses pénales avait augmenté depuis 20 ans et a expliqué les propositions du Sénat en matière pénale : rationaliser la liste des infractions et mettre fin à l’inflation législative dans ce domaine, augmenter le nombre d’officiers de police judiciaire, accroître le nombre de places de prison, en diversifiant les modalités de prise en charge des personnes détenues.

Favoriser le nécessaire dialogue des juges et de la société à travers le Parlement

Philippe Bonnecarrère

En finir avec le « syndrome du mardi » et les lois d’émotion

Les sénateurs sont longuement revenus sur la proposition 15 de la commission des Lois qui préconise de rationaliser la liste des infractions et de mettre fin à l’inflation législative dans ce domaine. Symptomatiques de ce phénomène, Philippe Bonnecarrère a mentionné que « les lois séparatisme ou Climat et résilience ont été généreuses en nouvelles infractions. »

« J’en ai par-dessus la tête de venir voter, tous les quatre matins, des lois d’émotion qui ne vont rien changer »

Philippe Bas, Sénateur de la manche,

En conclusion, les Sénateurs se sont élevé contre l’inflation législative qui encombre le calendrier du Parlement et mène à une inflation normative : « Je me suis toujours élevé contre ce que j’appelle le syndrome du mardi. Il arrive un drame dans le pays, et le mardi le Parlement ou du moins la majorité est convoquée par l’exécutif pour qu’on fasse, dans les huit jours, un texte. Et vous vous apercevez après analyse que nous avions tous les moyens pour faire face », a conclu Gérard Larcher.

Le besoin de plus de pédagogie

« La crise de confiance est bien réelle […] Elle est due à deux choses. D’abord, des raisons structurelles et ensuite le rôle croissant des médias et des réseaux sociaux qui contribuent à modifier le regard du citoyen sur la justice […] Communiquer pour la justice est devenue une exigence démocratique pour la justice »

François Molins, Procureur général de la république

Les magistrats présents lors de l’Agora ont demandé « plus de pédagogie à l’égard de la presse » pour faire comprendre les décisions par l’intermédiaire « d’un porte-parole dans chaque tribunal ».