Que change le PJL sécurité globale pour les polices municipales ?

Le Sénat vient de terminer l’examen du texte sécurité globale, texte qu’il a revu en profondeur.

Plutôt que de vous faire une présentation générale du texte qui serait trop longue, j’ai préféré répartir son analyse en 4 volets pratiques.

L’objet initial du texte était d’élargir les domaines d’intervention des polices municipales, de le faire pour les EPCI et les communes disposant de plus de 20 agents de police municipale, dans le cadre d’une expérimentation pour les collectivités volontaires et une durée de 3 ans.

Il s’agissait également de créer enfin une police municipale à Paris, sujet  marqué par l’histoire et la méfiance tant des provinces que de l’Etat central vis-à-vis du caractère « révolutionnaire » de Paris, de favoriser la mutualisation des polices municipales à l’échelle des EPCI et d’en améliorer la formation.

La liberté de créer ou de ne pas créer une police municipale reste bien entendu entière.

Tout ceci s’inscrit dans le cadre général du  « continuum de sécurité » devenu le nouveau mantra. La question nouvelle devient de savoir si, à côté des forces de sécurité constituées d’une part par la police et d’autre part la gendarmerie, nous en arriverons  à avoir une troisième force  constituée par les polices municipales.

Le gouvernement a prévu pour cela d’autoriser les agents de police municipale, dont le rôle est aujourd’hui cantonné à la constatation de contraventions, à contrôler certains délits (vente à la sauvette, conduite sans permis ou sans assurance, consommation de stupéfiants, occupation illégale d’un terrain communal à des fins d’habitation, destruction dégradation ou détérioration d’un bien d’autrui …).

L’idée est également d’étendre le champ des actes d’enquête ouverts aux agents de police municipale (relevés d’identité, saisie des biens ayant servi à la commission de l’infraction ou du produit de l’infraction).

Ne nous cachons pas que cette extension dans le cas d’une expérimentation répond à une demande forte d’une partie des maires, en particulier de la quasi-totalité des édiles des communes les plus importantes ainsi que des polices municipales elles-mêmes. Il y a une très grande césure entre les grandes communes avec de fortes polices municipales et la situation des autres collectivités.

Accessoirement au regard de leur nombre (500 France entière), il y a eu beaucoup de débats sur l’assimilation ou non des gardes champêtres aux policiers municipaux.

Nous avons été frappés avec mes collègues de la commission des lois par la contradiction interne de ce sujet. Les maires des communes importantes et leurs polices municipales  ne cessent de demander une extension du rôle des PM avec finalement la satisfaction de les voir assez facilement émerger comme une troisième force de sécurité avec de véritables pouvoirs d’enquête.

Pour le Sénat, cela dénature complètement le rôle des polices municipales qui, dans ces conditions relève du champ régalien, et leur statut. Plus les polices municipales assureront des tâches d’enquête, plus  elles seront sous la responsabilité des Procureurs de la République et par définition moins sous celle des maires.

Nous avons la conviction  que l’évolution des polices municipales les rendra de moins en moins municipales !

À l’issue des débats et de l’adoption du texte jeudi 18 mars, le Sénat a prolongé à 5 ans la durée de l’expérimentation, insisté sur l’amélioration de la formation des policiers municipaux.

Nous avons subordonné le maintien ou la généralisation de l’expérimentation à l’accord des communes ou des établissements publics, permis la création d’une police  pluri-communale,  entre des communes géographiquement proches mais aussi non contiguës. Les derniers obstacles devant la possibilité de créer des polices intercommunales ont été levés.

Une commune pourra mettre à la disposition d’une autre commune de l’EPCI ses gardes champêtres.

Les obligations d’information qui pèsent sur le procureur de la République en cas de classement sans suite d’une procédure lorsque l’infraction lui a été signalée par un maire ont été clarifiées.

Nous avons également accepté l’extension des délits pouvant être constatés par les policiers municipaux à la vive demande des maires des villes importantes en allant au-delà de la constatation de la consommation de stupéfiants et en autorisant également la saisie même si cela a pour nous l’inconvénient d’amener les polices municipales  sur le terrain de l’enquête.

Nous avons abaissé à 15 le nombre d’agents permettant à une commune de candidater à l’expérimentation pour sa police municipale.

Nous avons sécurisé la création de brigades canines dans les polices municipales.

Nous avons également rendu obligatoire la conclusion d’une convention de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l’État et en renforçant son contenu.

Nous avons également refusé la création pour les policiers municipaux d’un engagement de servir la commune ou l’établissement public, ou l’EPCI qui a pris en charge leur formation.

Il est exact que la formation des policiers municipaux coûte cher aux collectivités. Mais en faisant peser un risque financier sur les agents eux-mêmes, le dispositif risquait d’être contreproductif en diminuant l’attractivité des communes qui peinent déjà à attirer et à fidéliser des agents de police municipale.