Lutte contre le terrorisme : la dernière pierre ?

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Le 5 avril 2016, soit quelques jours après l’abandon du projet de révision constitutionnelle, le Sénat a adopté en première lecture, à une large majorité (299 voix contre 29) le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale.

Ce texte de lutte contre le terrorisme devrait être le dernier d’une série de textes adoptés en réaction aux évènements tragiques de l’année 2015. Il est destiné à prendre le relais de l’état d’urgence.

Un texte commun a été trouvé entre le Sénat et l’Assemblée nationale le 11 mai 2016, et nous avons adopté ce mercredi 25 mai ce texte dans sa dernière version.

En substance, ce projet de loi entend « renforcer » les outils à disposition des autorités administratives et judiciaires dans un cadre continu et hors du cadre exceptionnel de l’état d’urgence, de sorte à agir efficacement tout en garantissant le respect des libertés individuelles.

Je considère que notre dispositif pénal en matière de lutte contre le terrorisme est maintenant complètement au point, après un premier texte renforçant les sanctions et créant de nouvelles infractions en octobre 2014, la réforme du renseignement en 2015, suivie d’une première loi de procédure pénale, toujours en 2015.

Ce texte reprend plusieurs propositions sénatoriales. Les dispositions principales sont les suivantes :

– la possibilité de recourir aux perquisitions de nuit dès le stade de l’enquête préliminaire, sur autorisation judiciaire ;

– l’organisation d’un régime plus rigoureux d’exécution et d’aménagement des peines pour les détenus terroristes : le texte prévoit notamment de rendre applicable la période de sûreté incompressible de 30 ans (contre 22 ans actuellement) pour les criminels terroristes condamnés à la perpétuité ;

– la création d’une circonstance aggravante permettant de criminaliser certains délits d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ;

– l’accès facilité aux correspondances électroniques dans le cadre des procédures judiciaires ;

– la création d’un service de renseignement au sein de l’administration pénitentiaire et la possibilité de recourir à l’IMSI catching ;

– la validation de nouveaux délits : les infractions d’entrave intentionnelle au blocage des sites provocant au terrorisme ou en faisant l’apologie et de consultation habituelle de tels sites, ainsi que l’incrimination de trafic de biens culturels ;

– l’extension du dispositif particulier permettant la protection des témoins lorsque la révélation de l’identité d’un témoin est susceptible de mettre en danger sa vie ou celle de ses proches ;

– le renforcement des sanctions applicables en cas de non-dénonciation d’un acte de terrorisme en préparation ;

– l’irresponsabilité pénale des forces de l’ordre faisant usage de leur arme pour empêcher la réitération d’une attaque meurtrière de masse ;

Cette disposition nécessite quelques explications complémentaires au regard des critiques excessives dont elle a fait l’objet. Il ne s’agit pas d’un prétendu « droit de tirer » mais de créer un cadre juridique permettant aux forces de l’ordre – policiers, militaires et douaniers – de faire usage de leur arme pour prévenir la réitération d’une attaque d’ampleur.

Le texte dit avec bon sens que n’est pas pénalement responsable le policier… « qui fait un usage absolument nécessaire et strictement proportionné de son arme dans le but exclusif d’empêcher la réitération, dans un temps rapproché, d’un ou plusieurs meurtres ou tentatives de meurtre venant d’être commis, lorsque l’agent a des raisons réelles et objectives d’estimer que cette réitération est probable au regard des informations dont il dispose au moment où il fait usage de son arme« .

– la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, notamment en interdisant le paiement par cartes monétaires rechargeables quand elles ne peuvent être rattachées à un utilisateur identifiable.

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